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Un arc-en-ciel dans la nuit

Dominique Lapierre

Auteur de La Cité de la joie (entres autres) paru en 1985, Dominique Lapierre est un écrivain français né en 1931. Ancien journaliste à Paris Match, sa carrière lui a valu de nombreux grands reportages, comme celui de 1956 où il foula le sol russe au volant de la première voiture occidentale autorisée à pénétrer dans l’URSS poststalinienne.

Je ne regrette pas d’être sortie de ma zone de confort en lisant ce récit historique complet et vibrant de réalisme.

Très bonne pioche !

L'histoire :

Un arc-en-ciel dans la nuit nous dévoile la naissance tumultueuse de l’Afrique du Sud dans une chronologie nécessaire, du milieu du XVIIe siècle à l’aube du XXIe siècle. Une fresque éblouissante mettant en scène les fondateurs de la nation, leurs rôles, actions, destins.

Mon avis:

Puissant est ce livre dont l’histoire – très bien documentée – nous captive littéralement !

 

Aucun chapitre, mais une chronologie fascinante en quatre grandes parties.

Bien que la première, « Les chariots de la liberté », soit vraiment dense, chargée en noms étrangers aussi impossibles à prononcer qu'à retenir, en dates et évènements, exils, guerres et autres massacres, cette mise en place est évidemment nécessaire pour comprendre la suite, et reste néanmoins très bien écrite, ordonnée, claire et donc facile à assimiler.

Un premier hollandais débarque au Cap, à la pointe sud du continent africain le 6 avril 1652 pour planter des salades, il ne sait pas encore qu’il scellera l’histoire du pays.

La partie 1 se termine sur l’apparition de l’Apartheid, en 1948, est c’est une première claque pour moi, parce que je suis honteuse de dire que je n’avais jamais réalisé jusque-là que cette page de l’histoire était encore si proche !

« Séparer les communautés d’un pays entier dans toutes les expressions de leurs existences est une entreprise gigantesque qui n’a pas de précédent dans l’histoire de l’humanité. »

 

La seconde partie nous touche plus encore et nous en apprend davantage sur ce que le peuple noir a subi durant des années. La politique de l’Apartheid se met en place. Effrayant !

« C’est un pays qui accueille ses animaux sauvages dans de somptueuses réserves mais qui entasse dans un chapelet d’ignobles ghettos des millions de ses habitants. […] qui condamne deux enfants noirs ou métis sur trois à aller pieds nus à l’école, quand toutefois il existe une école. […] où quatre-vingt-dix pour cent des Noirs et des métis adorent le Dieu de justice et d’amour de leurs oppresseurs blancs […] »

Puis, au fil des pages et de manière toujours parfaitement ordonnée, c’est l’apparition du tout jeune Nelson Mandela ; le déploiement, pour déceler les Noirs et les métis, des méthodes utilisées par les nazis pour recenser les juifs ; la découverte pour la lectrice que je suis des innombrables lois et dispositions infligées par les législateurs de l’Apartheid aux Noirs du pays ; l’atrocité de la séparation raciale ; le petit carnet cartonné faisant office d’étoile jaune ; la propagande du gouvernement Verwoerd auprès du peuple blanc « choisi par Dieu » pour lui offrir « une Afrique où Blancs et Noirs vivraient en paix mais séparés. » ; la monstrueuse histoire – dans l’histoire — du Docteur Basson, son laboratoire, son vivier, ses recherches sur les bactéries tueuses et autres poisons destinés à éradiquer la population noire ; etc.

Douleur, désillusions, mensonges.

Le second grand volet nous laisse sur le procès de Mandela et les circonstances de son incarcération ; l'on vit l’épreuve avec lui et ses compagnons de voyage, dans une âpre consternation. Nous sommes en 1964.

 

Ce livre glace le sang, bouleverse, au fur et à mesure que l’on tourne les pages pour tout savoir, tout connaître dans les moindres détails.

 

Les troisième et quatrième parties s’enchaînent avec autant de détails et de renseignements sur cette épopée, les townships, les conditions de vie des zoulous, la montée de la persécution raciale et du déchainement du mal… L’épouvante ! Et puis l’extraordinaire et poignant récit sur ces acteurs de l’histoire – dans l'histoire –, Helen Lieberman et Christiaan Barnard, dont les noms nous font échos, bien entendu, mais dont je ne vous dévoilerai rien de plus afin de vous laisser découvrir en quoi, comment et à quel prix ils ont marqué les prémices d’un changement et transformé la vie du peuple exclus.

Courage, dévouement, formidable humanité au sein d’un pays disloqué par la haine raciale, la violence et la peur.

Quelle leçon, quelle baffe !

Et puis, le reste, tout le reste jusqu’à la fin du livre. La position du Commonwealth, la libération de Nelson Mandela après vingt-sept ans de détention, les atrocités qui ont encore suivi, la révolution des Noirs et la montée en puissance de leur déchaînement…

 

La presse mondiale fut unanime quant à l’accueil de cette œuvre parue en 2008, je ne peux qu’acquiescer en ajoutant que je n’ai qu’un seul regret, celui de ne pas l’avoir lue avant.

En prime, un petit recueil de très belles photographies avec légendes et explications, ainsi qu’une trentaine de pages d’annexes extrêmement intéressantes et utiles.

Pourquoi ce livre ne fait-il pas encore partie des lectures exigées dans les écoles ?

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