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Tu comprends que tu peux rester vivre à Maurice quand…

... tu réalises que ta patience est à toute épreuve !


Exemple IV… suite


En dehors de cette grosse entité gouvernementale qu’est l’EDB (Economic Development Board), la fameuse « Maison qui rend fou » chaque expatrié fraîchement débarqué sur le sol mauricien et que je vous ai décrite dans mon dernier post, il y a tous les commerces et autres institutions locales au fonctionnement on ne peut plus… local aussi.

À la Poste, par exemple, l’on vit de grands moments.

Dans ces locaux présents partout sur l’île – il faut dire que c’est l’une des plus anciennes institutions mauriciennes : 1772 – on peut tout y faire. On y envoie courriers postaux (logique) et non postaux (moins logique), mais on y paie aussi ses factures d’eau, d’électricité, de téléphonie, d’internet, la vignette de la voiture, et j’en passe ! C’est tout juste si on n’y achète pas son farata pour le déjeuner ! Pour les timbres, par contre, on n’a nullement besoin de faire la queue, puisqu’un(e) préposé(e) aux petites vignettes colorées se tient généralement à l’entrée, derrière une table, pour nous les vendre à l'unité, et c'est bien pratique !

Là encore, patience et adaptabilité sont les maîtres-mots. D’abord parce que les bureaux de poste ici ne désemplissent pas ; c’est plutôt normal vu que les mauriciens y traitent une grande quantité d’affaires et se déplacent en nombre, quitte à y passer la journée ! Ensuite parce que si vous venez en dehors du créneau horaire dédié à chaque type d’action, ben c’est foutu et il faudra revenir. La première fois que je me suis pointée à 10:59 (sans connaître ce subtil détail) au guichet des règlements pour acquitter ma facture Mauritius Telecom, après vingt bonnes minutes d’attente, j’ai dû tout remballer et prévoir la même action pour le lendemain, un peu plus tôt, cette fois. Enfin parce que le concept des horaires « fixes » d’ouverture est quelque peu hypothétique et qu’il n’est pas rare de se retrouver devant une feuille de papier scotchée sur la porte indiquant que la pause déj’ du jour se fait de 11:15 à 11:45. Grrrr !

Ensuite, il y a la banque. Là, c’est un instant (doux euphémisme que ce mot) singulier qui peut même tourner au sketch, si tant est qu’on puisse en rire. Qu’écrivais-je… déjà… quelques lignes plus haut ? Patience et adaptabilité ! Eh bien là, rebelote !

L’agence de la MCB (la Mauritius Commercial Bank) de La Croisette (grand centre commercial de Grand baie) est immense. Je ne connais pas le nombre d’employés qui grouillent là-dedans mais il en sort de partout, c’est incroyable. Un hall digne du marché de Rungis avec en son centre un comptoir d’accueil, tout rond, et deux agents (dont un pour la déco) qui sont censés renseigner et diriger, et paraît même qu’ils peuvent effectuer quelques opérations basiques. Évidemment, inutile de vous dire que deux fois sur trois quand on y parvient avant l’heure de fermeture (16:00), on n’est pas plus renseigné ni dirigé. Pendant que l’on fait patiemment la queue jusqu’à ce premier guichet et que le serpentin s’allonge, s’allonge, menaçant de s’écraser sur les larges portes vitrées de l’entrée (qui doivent restées fermées, clim oblige), il n’est pas rare de voir s’approcher d’autres agents dont le rôle est de désengorger la file en tentant de nous sortir de là et de nous informer avant que nous n’atteignions ledit comptoir… d’informations, justement. Alors on sourit, on est content, on est sauvé, on est sur le point de quitter le maudit cortège, d’être aiguillé directement vers le bon bureau, la bonne personne, la bonne borne à tickets. Hum ! Ne pensez-vous pas que si c’était aussi simple, ce post n’aurait pas lieu d’être ? Car en réalité, cette dernière démarche n’est souvent qu’un leurre. Étant donné qu’ici, chaque employé a un rôle bien défini et un champ d’action plus que limité, personne d’autre que celui désigné pour mettre un simple tampon sur un document n’est finalement en mesure de le faire. Alors, la réponse que nous entendons le plus souvent – à n’importe quel stade du parcours – est : « Veuillez patienter, on va s’occuper de vous. »

À la MCB, il y a les nombreux guichets à droite pour toutes les opérations courantes, avec pour chacun sa lente procession entre les rubalises. Il y a un majestueux escalier qui dessert les étages et les services commerciaux et qui débouche sur une impressionnante mezzanine digne de la galerie d’un grand théâtre new-yorkais. Clac, clac, clac, clic, clic, clic, clouc, clouc, clouc, les escarpins des employées en tailleur sombre résonnent toute la journée ; ça monte et ça descend, ça se salue, ça s’embrasse et ça rigole. Dans le fond du hall, il y a quelques boxes, de petits bureaux « privatifs » en open space qui donnent l’illusion de la confidentialité, à condition de ne pas mesurer plus d’un mètre soixante-dix et surtout d’être aphone. Et puis il y a sur la gauche en entrant, trois bureaux alignés, derrière lesquels trois gentils administrateurs reçoivent les clients pour les opérations financières comme les ouvertures de comptes, les remises de relevés bancaires (si, si, j’vous jure ! Et c’est payant !) etc. Ici, c’est un système de tickets qui régit l’ordre de passage d’une quinzaine de prospects en moyenne… devant trois conseillers – en moyenne aussi – qui ne sont pas souvent là simultanément. Une fois de plus, des employés sortis de nulle part viennent tout sourire vous départir de votre torpeur en vous proposant naturellement d’aller faire trois courses « en attendant » votre tour, et de bien conserver votre ticket, cela va de soi.

Il y a ceux qui prennent le risque de s’installer en terrasse au café d’en face pour essayer de se détendre, mais qui font des allers-retours pour surveiller le numéro qui s’affiche sur l’écran ; bonjour la détente ! Et ceux qui restent vissés à leur chaise en plastique (il n’y en a pas pour tout le monde) parce que s’échapper quelques minutes pour se dégourdir les gambettes, c’est une bonne idée, mais revenir au moment précis où le numéro 174 s’affiche alors qu’on lit 173 sur son ticket, c’est plutôt rageant !

Chez Mauritius Telecom, l'opérateur de télécommunications national et historique qui a aussi sa vitrine à La Croisette : même combat. Un premier agent à l’entrée vous dirige soit vers les sièges d’attente (à deux mètres) si vous souhaitez voir un conseiller, soit vers le fond pour effectuer un règlement. Même si vous connaissez parfaitement le fonctionnement des lieux, vous jouez le jeu – sourire et politesse – parce qu’il faut bien que l’employé justifie son poste. À l’arrière du magasin, donc, derrière un long comptoir où je peux poser mon menton, trois caissiers tournent et retournent avec une conviction qui n’a d’égal que la nonchalance des îles une petite pancarte pour avertir si c’est « Closed » ou « Open », et un autre gentil petit monsieur en uniforme nous fait signe de nous approcher du premier, deuxième ou troisième agent, selon ce qu'il lit sur l'écriteau. Plusieurs combinaisons possibles : Closed-Open-Closed, on passe à un ; Open-Closed-Open, on passe à deux ; Closed-Closed-Open, on passe à un, à nouveau, etc.

Bien sûr qu’on s’en sortirait tout seul… mais un sourire et un merci, ça légitime un emploi et ça fait du bien à tout le monde !

Ensuite, il y a tous les commerces, magasins de fringues, de chaussures, de jouets, d’électroménager, de sports, les bijouteries, boutiques de souvenirs, librairies, prestataires de services, restaurants, etc. qui emploient un nombre improbable de personnes ; c’est d’ailleurs à se demander si ce n’est pas inversement proportionnel à la taille du local. Ne vous méprenez pas, le nombre de salariés n’est pas un indicateur de bonne marche pour toutes ces entreprises ; les salaires à Maurice sont extrêmement bas (l’équivalent de 400€ en moyenne, 200€ au minimum) et les charges patronales s’élèvent à moins de 7% seulement. Autant dire que les enseignes internationales par exemple – en grand nombre ici – peuvent allègrement s’offrir trois ou quatre employés mauriciens pour le tarif d’un expat ! Le choix est vite fait et ne favorise pas l’amélioration du système économique de ce petit pays insulaire ! Est-ce pour autant normal en tant que client d’avoir ce sentiment désagréable de déranger les employés dans leur inaction quotidienne, de leur demander la lune quand on cherche une taille ou un article qui n'est pas en rayon, de les fatiguer davantage en réclamant une facture ou un ticket sans prix ?


Eh bien pour éviter de me poser la question et de m’agacer dans mon quotidien mauricien quant à cette particularité de fonctionnement, je me résigne et tente de compatir (à défaut de comprendre) au mieux à la lenteur de tous ces travailleurs lymphatiques et démotivés (et pour cause).

J’accepte avec philosophie de demander trois fois – sourire et politesse, toujours – le sel et le poivre au restaurant. D’attendre des heures l’intervention pourtant programmée d’un technicien qui ne viendra jamais et ne jugera pas important de prévenir. D’appeler deux fois, en doublant de deux mails, pour demander un devis chez un traiteur et de ne jamais obtenir de réponse, malgré les "Oui, Madame, bien sûr, Madame!"…

Parce que pour avoir le grand privilège de vivre à Maurice, sous le soleil et face à l’océan, auprès d’un peuple foncièrement ouvert, gentil et pacifique, il faut en payer le prix !


Alors, tu comprends que tu peux rester vivre à Maurice quand tu réalises que tous ces petits désagréments n'altèrent pas la qualité de vie qui règne ici, et ne sont rien à côté du danger que représente aujourd'hui la vie dans certains pays du Monde, où poussent la violence, l’insécurité, la menace du terrorisme.


Mo kontan Moris !



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